On pige dans le patrimoine!
Comme c’est le cas pour la plupart des produits de
consommation, le marché de la montre n’échappe pas au dictats des tendances.
Après tout, on aura beau parler des merveilles techniques que sont les montres,
de leur esthétique et de leur rôle dans la vie quotidienne des gens, le monde
de la montre-bracelet, c’est aussi (et surtout) une question de business et de
marketing!
Depuis maintenant une bonne décennie, les fabricants de montres
pigent de façon plus fréquente dans leur patrimoine pour offrir des versions
modernes de leurs classiques, toujours dans le but de susciter l’intérêt des
amateurs. C’est d’ailleurs un phénomène présent dans plusieurs autres secteurs.
Pensez aux rééditions de certains types de voitures, comme la Dodge Challenger,
la Fiat 500, le Ford Bronco ou la Mini Austin.
Les amateurs de montres se voient aujourd’hui offrir un
large éventail de modèles modernes (neufs) qui s’inspirent directement du
passé. En voici quelques exemples :
La Marlin de Timex
Il s’agit d’une des lignes de montres les plus emblématiques de Timex. Lancé dans les années cinquante, ce modèle se voulait résistant à l’eau, d’où le nom du poisson (« Marlin » est un espadon en français) et le « Waterproof » qu’on retrouve sur le cadran. La Marlin est offerte par Timex, en différentes versions, jusque dans les années 1980.
Une Marlin datant de 1974. Photo : François Cartier |
C’est un des premiers modèles que Timex ramène sur le marché. La version moderne, lancée en 2017, est très ressemblante à l’originale. Elle propose un diamètre de « seulement » 34 millimètres, une taille bien plus modeste que la plupart des montres actuelles. Son apparence est très fidèle à l’originale, notamment au niveau du styler des chiffres sur le cadran. La principale différence est le matériau du boitier, qui pour la version de 2017 est fait d’acier inoxydable et non d’étain chromé. De plus, le modèle original est équipé d’un mouvement mécanique fabriqué par Timex. La Marlin moderne fonctionne plutôt avec un mouvement fabriqué en Chine. Ah oui, et le prix! En 1960, une Marlin coûtait environ 10$, alors qu’il faut débourser 210$ aujourd’hui*.
La Marlin moderne, à gauche, et celle qui lui a servi d'inspiration. Photo : François Cartier |
La publicité de Timex pour la réédition de la Marlin. Même l'infographie se veut d'un style très "vintage"! Source : Timex.com |
Un extrait du catalogue Timex pour l'année 1960. Source : https://heritage1854.com/ |
La Chronograph C de Bulova
Comme Timex, Bulova est une marque bien établie qui possède une riche histoire. Fondée en 1875 aux États-Unis, Bulova est maintenant la propriété du géant japonais Citizen. Et comme Timex, Bulova a récemment commencé à puiser dans ses anciens catalogues afin de ressusciter quelques-uns de ses modèles emblématiques.
L’un d’entre eux est un chronographe mis en
marché en 1970. Baptisé bien ordinairement « Chronograph C », il s’agissait
d’une montre avec un style très flamboyant qui était aux antipodes de ce que
Bulova produisait habituellement à cette époque. Une Bulova, c’était habituellement
une montre au look sobre et classique. Et voilà qu’arrive cette montre sportive
aux couleurs vives, d’une diamètre largement supérieur aux autres montres de l’époque
(43mm), dotée de surcroit d’un chronographe! Comme le disait la publicité à l’époque,
« un regard vous permettra de connaître le temps écoulé, quelle heure il
est et quel chrono vous faites »!
Source : https://www.watchtime.com |
Étrangement, la Chronograph C n’est seulement offerte que pendant une année. N’empêche, elle devient un des modèles emblématiques de Bulova. Originalement vendue pour 125$ (US), elle est encore très prisée par les collectionneurs. Les exemplaires originaux se vendent aujourd’hui pour plusieurs milliers de dollars. À cause de ses couleurs bleu, blanc et rouge (et de sa provenance américaine), elle est alternativement surnommée la « Patriot » ou la « Stars and Stripes ».
La Chronograph C originale. Source : https://www.fratellowatches.com |
Il ne faut donc pas se surprendre que Bulova ait décidé dès 2017 d’inclure une version moderne de la « C » dans sa série « Archives »**. La nouvelle version reprend de façon assez fidèle le look de la montre originale : mêmes couleurs et aiguilles, une lunette dentelée (l’anneau métallique qui encadre le verre), absence de cornes (les petits « bras » qui servent à fixer le bracelet), de même qu’un bracelet de mailles en acier inoxydable.
La réédition lancée en 2017. Photo : François Cartier |
L’autre différence notable est la taille. Alors que la C
originale faisait 43mm de diamètre, la réédition affiche une dimension de 46mm.
Il s’agit de formes assez généreuses, mais la montre ne paraît pas trop grosse
au poignet grâce à l’absence de cornes.
La « banane » de Tissot
Avec les deux exemples que nous venons de voir, c’est un
passé relativement récent qui a servi d’inspiration à Timex et Bulova. Pour sa part, la
marque suisse Tissot est retournée encore plus loin en arrière pour remettre
une ancienne montre au goût du jour.
Notons d’abord qu'à l'instar des autres marques, Tissot a
aujourd’hui sa propre collection de montres revues au goût du jour. On peut lire, sur son site web : « La
collection Tissot Héritage rend hommage à l'histoire de Tissot, fondée en 1853
au Locle, en Suisse, en revisitant certains anciens modèles dans un style
contemporain » .
Le modèle que nous présentons ici est la Tissot Heritage Banana***, Édition du Centenaire. Pourquoi associer le nom de ce fruit à une montre? C’est que cette Tissot, originalement lancée en 1916, possède un boitier de forme allongée et incurvée afin de bien épouser le poignet de son propriétaire.
Source : catawiki.com |
En plus de ses formes distinctives, cette Tissot arbore un cadran avec des chiffres de style Art nouveau. Ce mouvement artistique est né à la fin du 19e siècle en réaction aux anciens styles décrit comme « sclérosés ». L’Art nouveau s’inspire de la nature et des formes courbes, d'où la forme assez exhubérante des chiffres sur le cadran.
La Tissot Banana
est donc un bel exemple d’une application de ce style au monde horloger. De plus, à cette époque, produire une montre au boitier incurvé représentait tout un défi,
surtout au niveau du mouvement mécanique qui devait être assez petit pour s’ajuster
à la forme particulière de la Banane!
La réédition de 2016 est une adaptation assez fidèle du
modèle original. Même forme, même style, même… courbature! Tissot a aussi conservé
les aiguilles de type « Breguet » et une couronne oignon. Comme pour
la Bulova, on a toutefois choisi de remplacer le mouvement mécanique par un
équivalent au quartz ultra-fin (vous savez, à case de la banane!). Plus simple
et moins cher. La montre est offerte avec un cadran noir, doré ou blanc.
La version moderne de la Banane. Photo : François Cartier |
Pour la petite histoire, Tissot n'a pas l'exclusivité des montres invurvées. Un autre modèle très populaire est la "Curvex" de la marque américaine Gruen. Même si ce modèle allait devenir un des plus populaires de la comagnie, la Curvex n'est arrivée sur le marché qu'en 1936, soit bien après la Banane!
* En devise américaine. 10$ en 1960 équivaut à environ 100$
aujourd’hui.
** La série « Archives » de Bulova propose justement des modèles neufs inspirés du passé.
*** Le véritable nom de la montre est « Classic Prince »
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